Le seul homme de la situation capable de venir en aide au dauphin et lever le siège d'Orléans : c'est Gilles de Rais. Il était devenu l'homme le plus puissant du royaume, aussi puissant que le dauphin. On dit qu'il ''avait une garde de 200 hommes à cheval, et qu'il avait une suite d'une cinquantaine de personnes comprenant chapelains, enfants de ch½ur, musiciens, pages, serviteurs, etc., tous montés et nourris à ses dépens et se faisait précéder par un porte-croix autorisé par le pape en personne''. On dit même qu'il dédommageait les parents en achetant jeunes gens et jeunes filles pour les adjoindre à sa suite.
Mais du temps de Gilles de Rais, planaient aussi des idéaux mystico-religieux comme l'était l'inaccessible Arcadie, un peu le pendant de la mystérieuse Atlantide de Platon.
Il est fort probable que, lorsqu'il s'est agi de bouter les Anglais hors de France, cela se fit comme une Croisade pour libérer le pays. On allait atteindre les nimbes de l'Arcadie dans les pas d'un Ordre sans église, d'une ''Femme sans enfant'', bref d'une ''Vierge'' tout simplement. L'Ordre dont la tête pensante éclot probablement à Domrémy, sur les terres du dauphin, sera la ''Jeanne d'Arcadie'', un sentiment nationaliste fait chair dans la personnification d'une Vierge comparable à ce que représente la ''Marianne'' de nos jours, visage archétypal n'ayant pas réellement existé mais présent partout où on la cherche. Tous se rangeront, corps et âmes, sous la bannière de ''l'Ordre de la Jeanne'' qui soutiendra le dauphin Charles pour libérer le royaume de France de l'étranger.
L'histoire revisitée
Gilles de Rais, capitaine commandeur de l'Ordre de la Jeanne, avec plusieurs victoires à son palmarès (Lude, Rainefort, Malicorne), va rencontrer le dauphin Charles à Chinon et le convainc d'adjoindre les armées du roi à ses propres troupes pour libérer Orléans. A partir de là, le porte-croix qui le précède se mute en porte-étendard en la personne d'un jeune soldat (voire d'une improbable jeune fille), trop jeune pour le maniement des armes. Il cristallise et assure la cohésion des troupes en devenant la symbolique Jeanne.
On sait, par ailleurs, que Gilles de Rais était le petit neveu de Bertrand Du Guesclin. Quand il se présente devant Charles, c'est un peu comme s'il mettait l'épée de Du Guesclin à son service pour réactiver les premières charges héroïques de son grand-oncle contre les Anglais au siècle précédent. Or, lorsque Jeanne se présenta devant le dauphin Charles, c'est justement pour lui demander de lui confier l'épée de Du Guesclin, c'est-à-dire celle de Gilles de Rais en personne. Gilles de Rais n'étant assurément pas un homme d'armes du dauphin, il convient de considérer le côté symbolique de l'événement faisant que ce dernier accepta que le porte-épée descendant de Du Guesclin vienne à son secours avec ses troupes.
Fort de la libération d'Orléans et de la victoire de Patay, le dauphin s'imposera aux Français et sera sacré a Reims sous le nom de Charles VII, le 17 juillet 1429 comme le firent les souverains qui l'ont précédé.
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